Avec son sacre le 24 janvier dernier, la veille de la Journée Internationale du sport féminin, Isabelle Galmiche a attiré la lumière. La co-pilote de rallye est entrée dans l’histoire en remportant le mythique Rallye de Monte-Carlo aux côtés de Sébastien Loeb dans le Ford Puma Hybrid Rally1. Dans cette interview exclusive Ford, celle qui a inscrit la plus belle ligne à son palmarès à 50 ans, nous parle de son amour de la vitesse, de la compétition dans un sport à prédominance masculine et de l’importance de poursuivre ses rêves.
Vous êtes devenue la première femme copilote à remporter une manche du WRC depuis 25 ans. Décrivez-nous les émotions que vous avez ressenties lorsque vous avez réalisé que vous aviez gagné ?
Franchement, les émotions, les sensations, c’est presque indescriptible en fait. Parce que je suis passionnée de rallye depuis toujours. Et je n’arrête pas de le dire, participer au Monte-Carlo avec Sébastien Loeb, c’était quelque chose d’inespéré ! C’est génial ce qui m’est arrivé !
Dans un petit coin de ma tête, je me disais qu’on pouvait faire un bon résultat avec cette nouvelle voiture et Sébastien qui, ce n’est pas un scoop, a vraiment un talent fabuleux.
C’était génial de vivre cette aventure avec lui. Et comme il se sentait hyper bien pendant les séances d’essais qu’on a faites ensemble, qu’il se sentait aussi hyper bien dans la voiture, et que moi aussi, j’ai quand même un peu d’expérience en rallye, je me suis dit qu’on pouvait faire un beau résultat, mais pas forcément que l’on allait gagner.
Je n’arrive pas encore à réaliser, je suis tellement contente ! C’était quand même le Rallye de Monte-Carlo. C’était la première fois que je faisais un rallye avec Sébastien Loeb, rien que pour cela, j’étais déjà super emballée. Alors avoir gagné, c’est juste fabuleux, c’est indescriptible !
Comment avez-vous commencé le rallye ? Et quand avez-vous réalisé que vous aviez un réel talent pour ce sport ?
Je crois que le talent vient avec l’expérience. Je suis passionnée et donc très investie dans le rallye. J’ai participé aux Formules de Promotion de Citroën, c’était un peu comme des petites écoles pour le rallye. Cela m’a permis de côtoyer plein de copilotes, d’apprendre plein de choses, de faire beaucoup de rallyes dans différents championnats.
Je ne sais pas si j’ai du talent, je sais juste que je suis hyper passionnée et que je m’investis à fond dans ce que je fais. Et j’adore ça.
Et pourquoi pas pilote ?
Je suis passionnée depuis toute petite. J’ai toujours aimé la vitesse. Initialement, je souhaitais être pilote, mais la vie a fait que j’ai rencontré mon compagnon, Laurent, qui commençait les rallyes et m’a proposé d’être sa copilote. Et donc, depuis 1995, je suis copilote et, à chaque fois que j’ai l’opportunité de faire des rallyes, je le fais.
Les femmes sont rares dans cet univers, qui sont vos modèles féminins dans le sport automobile et ailleurs ?
Alors, il y a quand même des femmes qui ont marqué le rallye, comme Michèle Mouton. Mais elle, elle était plutôt derrière le volant, elle n’était pas copilote. Au niveau national, comme les championnats de France, et dans les rallyes régionaux, il y a plein de femmes. En revanche, au plus haut niveau, c’est vrai que c’est très rare mais, je ne connais pas la raison. Moi, je crois que ce sont des petites opportunités qui ont déterminé mon chemin de vie, et m’ont amené à finir avec Sébastien Loeb au Monte-Carlo, donc je suis super chanceuse ! Je ne savais pas que cela faisait aussi longtemps qu’il n’y avait pas eu une femme gagnante au rallye WRC. Je regarde souvent le rallye à la TV, il n’y a pas de femme ou très peu.
Elles ne sont pas encore mises en avant, ou pas présentes sur les podiums pour pouvoir être mise en avant.
Oui, on peut les compter sur les doigts de la main.
Quelles sont les caractéristiques que devrait avoir un copilote ?
Je crois qu’il faut avoir beaucoup de sang-froid. Il faut avoir de bonnes capacités d’adaptation et être rigoureux, vouloir bien faire les choses, aimer les sensations fortes, la vitesse. Quelques fois, ça dépend du terrain, mais on est quand même beaucoup chahutés dans les voitures. Moi, j’adore ça !
Pouvez-vous nous parler de vous ? Votre vie professionnelle en tant qu’enseignante.
Je suis formatrice pour adultes, je n’interviens pas dans l’éducation nationale en France. Mon employeur, c’est un CFA (centre de formation d’apprentis). Cela fait maintenant 25 ans que j’y travaille, depuis 97 ! Je ne sais pas si ma victoire est un clin d’œil à mes deux activités, puisque la dernière victoire d’une femme à un Rallye date de 97 également.
Cela fait 25 ans que je suis dans la même entreprise, j’ai de la chance, car elle m’a permis de vivre ma passion en m’accordant des congés quand je le souhaitais. Bien-entendu, c’était bien organisé, mais c’est quand même elle qui m’a permis de faire des rallyes.
Et depuis toujours, ma vie tourne autour des rallyes, tous mes congés, mes week-ends, c’est pour le rallye. Et je sais que ce n’est pas donné à tout le monde de pouvoir vivre ses passions.
Je suis épanouie dans mon travail, j’ai un boulot qui me plaît vraiment et je peux aussi vivre ma passion depuis des années donc c’est vraiment cool !
Pensez-vous que vos élèves ont été impressionnés que leur professeur ait remporté un rallye mondial ?
Certains sont impressionnés, c’est sûr, et particulièrement parce que j’essaye de séparer ma vie professionnelle de ma vie personnelle. Je suis quelqu’un de plutôt discret.
J’ai donc été absente 15 jours mais je n’avais pas dit à mes stagiaires que j’étais partie faire le rallye de Monte-Carlo avec Sébastien Loeb. Seuls mes collègues le savaient. Mais bien-entendu, quand je suis revenue, tout le monde était au courant.
Pour l’anecdote, quand je suis revenue, mes collègues avaient mis des affiches sur la porte de ma salle et mes stagiaires m’ont applaudi quand je suis rentrée. Et bien entendu, on a eu une petite discussion autour du rallye.
Ils sont tous contents pour moi et certains sont vraiment très fiers et pas forcément surpris. Ils m’ont dit qu’avec du recul, ils ne sont pas étonnés. C’est certain que cela change un peu la vision que les gens ont de moi.
Vous et Sébastien Loeb avez montré que l’âge n’est pas un obstacle à l’établissement d’objectifs et à leur réalisation. Souhaitez-vous continuer à concourir pendant de nombreuses années ?
Tant que je serais passionnée – à mon avis, ce n’est pas près de s’arrêter – et que mes capacités physiques me le permettront, je continuerai à faire du rallye.
Il n’y a pas de raison d’arrêter, ce n’est pas une question d’âge. D’ailleurs, je pense qu’on était l’équipage le plus vieux en WRC.
Y a-t-il une chance que Loeb et vous participiez à plus de courses cette année comme le demandent les fans ?
Honnêtement, pour le moment, il n’y a vraiment rien de défini. Mais moi bien entendu, j’espère qu’il y en aura d’autres ! Je sais aussi que Sébastien Loeb a un programme hyper chargé, mais j’espère vraiment qu’il y en aura d’autres. Même si je suis consciente de la chance que j’ai eue, je serai quand même déçue s’il n’y en a pas d’autre.
Avez-vous un dernier message à faire passer, plus particulièrement aux femmes ?
Si j’ai un message à faire passer, c’est que je suis la preuve qu’il faut toujours croire en ses rêves et qu’il ne faut jamais abandonner ! Ce qui m’est arrivé, ce n’est pas un hasard, c’est sûr, mais c’est le fruit de plein de choses, et c’était vraiment un rêve, je n’arrête pas de le dire. Et même si on prend de l’âge parce qu’effectivement, c’est un peu tardivement que j’ai vécu ma première victoire en WRC, cela n’a pas d’importance.