L’œil dans l’objectif
Pour marquer le coup du passage du tiers de la course, la spéciale 4 était tout simplement la plus longue de la 44e édition du Dakar. Un chrono redouté qui affichait pas moins de 465 km. David Castera avait annoncé le tempo hier soir au briefing, il s’agissait d’une valse à trois temps. Une première section de 40 km avec de nombreuses intersections en Y, qui pouvait donner des nœuds à la tête, avant de passer à la zone de dunes du jour, puis une fin de spéciale annoncée comme « plus technique ». Et avec 80% de terre, parfois copieusement humide, tel le lit d’oued rencontré en fin de spéciale, il y avait plus à perdre qu’à gagner entre Al Qaisumah et Riyadh. Peterhansel, Roma, Chicherit, Domzala, pour ne citer que les plus connus, en ont malheureusement fait les frais. Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, certains en ont profité malgré cela pour augmenter leur collections de victoires d’étapes à l’image d’Al Attiyah et Barreda.
L’essentiel
Barreda a fait du Barreda. Parti en 24e position, il a profité de la plus longue spéciale du rallye pour se lancer dans une spectaculaire cavalcade, récupéré en chemin son coéquipier Pablo Quintanilla avec qui il pouvait se sentir en confiance pour assurer la navigation, et foncé jusqu’à la ligne d’arrivée pour aller y signer le meilleur temps.
Ceci pour la 29e fois de sa carrière sur le Dakar, rien que ça ! Au passage, le Valencien se hisse à la 7e place du classement général, frappant à la porte d’un Top 5 toujours dominé par Sam Sunderland, à présent devant l’Autrichien Matthias Walkner. Cette élite, Lorenzo Santolino l’a bel et bien intégrée en signant le 4e temps, pendant que son coéquipier chez Sherco, Rui Gonçalves signait son premier podium d’étape (voir « La perf’ du jour »).
Nasser Al Attiyah n’a jamais connu un Dakar sans victoire d’étape depuis 2007, mais il se serait volontiers passé de la 44e, qu’il a conquise sur la route de Riyadh après une pénalité infligée à Yazeed Al Rajhi, signataire sur la ligne du meilleur temps.
Car pour l’étape en boucle de demain, il aura très rapidement dans son rétro son plus proche rival (à 38’ tout de même), Sébastien Loeb ayant eu la bonne idée de terminer 2e de l’étape, après avoir repris en main un BRX Hunter en parfait état tout au long de la journée.
Bien loin des considérations de l’ordre de départ du lendemain, le Sud-Africain Henk Lategan a bien montré que son rythme de course lui permettait de viser haut en signant de superbes temps intermédiaires, mais a perdu tout espoir de bien figurer au général après avoir méchamment endommagé sa roue arrière droite au km 310… fin de la partie. Le team BRX a connu aussi son lot de misères, « Nani » Roma ayant dû stopper sa route après un tonneau dont son auto n’a pu se remettre. Le vainqueur 2014 fait lui aussi une croix sur le podium. En quads, le tenant du titre argentin Manuel Andujar continue son travail de remontée dans la hiérarchie, dont le patron reste Pablo Copetti. Chez les T3, le show Quintero se poursuit avec une quatrième victoire de spéciale, pendant que « Chaleco » Lopez gère son avance d’une vingtaine de minutes sur son coéquipier chez South Racing, Sebastian Eriksson. L’équipe domine dans le même style chez les T4 avec Austin Jones, qui ne s’offusque pas de voir le clan polonais rafler les spéciales. C’est aujourd’hui Michal Goczal qui s’impose, avec deux victoires au compteur cette année, comme son frérot Marek ! On joue un peu aussi en famille chez les camions, Eduard Nikolaev apportant la 170e victoire de spéciale de la maison Kamaz, qui mène la course avec Dmitry Sotnikov.
La perf’ du jour
Depuis sa création par Marc Teissier en 1988, la marque française Sherco s’est fait une place parmi les constructeurs qui comptent en trial et en enduro. Cette ascension fulgurante a certainement dû inspirer aujourd’hui deux de ses trois pilotes officiels, cette fois-ci en rallye-raid. Rui Gonçalves et Lorenzo Santolino se sont payés le luxe d’un tir groupé aux 3e et 4e places, derrière les deux Honda officielles de Barreda et Quintanilla, sur la plus longue spéciale de cette édition. Hier, Rui a créé la sensation de début de course. Aujourd’hui, il concrétise par un podium d’étape, le premier de sa carrière sur le Dakar, à sa 2e participation. Tout en régularité, « Santo » signe des 6e, 15e et 4e places depuis le départ de Jeddah et occupe au tiers de course la 5e place du général provisoire à 10’28’’ du leader. L’embellie survient pour Sherco alors que mi-septembre dernier, le service course de l’usine de Nîmes partait en fumée dans un incendie accidentel, les mécaniciens ne sauvant que les motos de course. De quoi corser la préparation pour le Dakar, mais pas suffisant pour entamer la motivation du staff technique tricolore qui reçoit une première récompense aux efforts déployés pour aligner trois 450 SEF Rally revues de fond en comble. « Impossible n’est pas français » dit un proverbe patriote, et Sherco l’a déjà prouvé en devenant champion du monde trial et enduro. Cette année, la marque s’attaque à nouveau au Dakar et s’est engagée au championnat du monde de rallye-raid avec un seul objectif : ne pas faire mentir le dicton.
Le coup dur du jour
Avec Michal Goczal aujourd’hui à la suite de la pénalité pour excès de vitesse infligée à Rodrigo Luppi De Oliveira et d’Austin Jones, seuls des Polonais ont trusté la plus haute marche du podium d’étape chez les SSV. Et parmi eux, figure Aron Domzala qui a empoché une étape au cours des deux dernières éditions du Dakar. Il s’est illustré à de nombreuses reprises, mais son manque de régularité a joué en sa défaveur. Dans le monde sans merci des rallyes-raids, il y a aussi une part de chance et Domzala en a clairement manqué. Aujourd’hui, il faut croire qu’un chat noir soit parvenu à infiltrer le baquet du Can-Am pour sévir à hauteur du km 300. Domzala se battait pour la victoire notamment face à ses compagnons du clan South Racing, Austin Jones et Rodrigo Luppi De Oliveira, quand il a été victime d’un problème mécanique. Pointé au sixième rang du général en amont de cette quatrième étape à 39’ de Jones, Domzala, qui voulait faire au moins aussi bien que sa troisième place l’an passé, a sans nul doute perdu ses chances de se hisser à nouveau aussi haut à Jeddah.
La stat’ du jour : 4
Yazeed Al Rajhi était promis à la victoire aujourd’hui, mais le Saoudien est allé un peu trop vite en besogne, voire juste un peu trop vite… « Flashé » pour excès de vitesse, le représentant Toyota a reçu cinq minutes de pénalité et s’est retrouvé exclu du podium. C’est donc à Nasser Al Attiyah que revient l’honneur de se hisser sur la première marche de la 4e étape du 44e Dakar. C’est la 44e fois de sa carrière que le Qatarien parvient à s’imposer et il lui manque dorénavant 4 succès pour se porter au niveau de son plus grand adversaire Stéphane Peterhansel en deuxième position des pilotes les plus prolifiques au Dakar derrière le légendaire Ari Vatanen (50 succès). Au volant de sa Toyota Hilux GR DKR T1+, il termine devant la Prodrive de Sébastien Loeb, l’Audi de Carlos Sainz et la Mini de Yasir Seaidan, pour 4 constructeurs aux 4 premières places. Dans tous les cas, une chose est sûre : avec trois victoires au compteur cette année, Al Attiyah n’y va pas par 4 chemins pour rejoindre Jeddah le plus vite possible.
World rally-raid Championship
T3/T4, les chasseurs d’étapes font le match
En parallèle de leur bataille pour le titre du Dakar, un duel se joue aussi pour le championnat du monde entre Nasser Al Attiyah et Sébastien Loeb. Sa 44e étape fait monter la cagnotte du pilote Toyota à 17 points, sans distancer totalement son rival de chez BRX qui en totalise 13.
La situation est sensiblement différente chez les T3, Seth Quintero ayant perdu ses chances de victoire sur le Dakar, mais pas la motivation de rejoindre et dépasser « Chaleco » au W2RC : justement, avec une troisième étape, le jeune Américain se retrouve précisément à égalité à 15 points avec le Chilien. En s’imposant sur cette première étape de Riyadh, c’est aussi à une égalité parfaite avec Austin Jones qu’est arrivé le Polonais Michal Goczal. En camions, Martin Macik voit lui aussi son avance se réduire, mais la concurrence est certainement plus douce à supporter, venant de son coéquipier chez Big Shock Racing, Kees Koolen.
Sur un air de Classic
« Jamais deux sans trois », dit un dicton français que s’est accaparé l’équipe de RumboZero. Pour la première édition du Dakar Classic, les Espagnols avaient engagés deux Mercedes Classe G. Cette année, ils sont revenus en force avec un troisième véhicule et un nouveau pilote en la personne de Jesus Fuester Pliego qui fait mouche aujourd’hui. Un duel entre les Mercedes et les Toyota a animé les débats puisqu’ils occupent ce soir les huit premières places du provisoire. Le Top 10 est trusté par des équipages qui ont choisi les moyennes basses ou intermédiaires… et deux camions Mercedes figurent aux premières loges. Le Dakar Classic ne se joue pas franchement sous le capot mais plutôt au cerveau. Et Serge Mogno comptait bien sur celui de son copilote Florent Drulhon. Ce consultant informatique n’a apparemment pas mis longtemps pour devenir une épée en régularité. Normal pour cette ancien escrimeur de haut niveau ! Ni Serge, ni Florent n’avaient jamais pratiqué la régularité. Florent n’avait même jamais pris le départ d’une course automobile en quittant Jeddah. La chance du débutant ? Pas vraiment, déformation professionnelle oblige, il avait bien « un peu » anticipé les choses. Avec son épouse, dans leur trajets du quotidien où il avait embarqué une balise GPS et une tablette sur les genoux. Sa façon de préparer son « road to Dakar » en allant au supermarché ! Un profil à l’opposé de celui des spécialistes que sont le couple Euvrard. Adeline est une princesse de la régularité, elle est montée sur les trois différentes marches du Rallye des Princesses. Troisième du général provisoire dans leur ML aux couleurs de celui de René Metge et sa fille Elodie en 2003. Un ex Groine sur le passeport technique duquel figure le nom de Jean-Pierre Strugo. Une légende du Dakar qui a entamé sa 29e participation depuis 1985 en catégorie T1 dans une Optimus de MD Rallye Sport ! Rentrer dans l’univers du Dakar Classic, c’est mettre en route un métronome où les histoires se répondent à l’infini !
La réaction du jour
Sébastien Loeb : « Trois pilotes en 40 secondes, le niveau est serré ! »
Le pilote BRX signe le 3e temps à l’arrivée de la spéciale, et se réjouit également de partir juste derrière Nasser Al Attiyah pour l’étape cruciale de demain.
« Globalement on a eu aucun problème dans la spéciale. Il fallait bien rouler sans se faire piéger parce qu’il y avait pas mal de pierres. On est resté concentré sur la nav’, en prenant un bon rythme. Au final cela nous place 3e, mais 3 pilotes en 40’’ après 450 kilomètres, ça prouve que le niveau est serré. Je préfère être derrière Nasser aujourd’hui pour partir derrière lui demain. Vu qu’il n’y a pas de motos devant, les premières voitures vont se regrouper, donc ce n’est pas plus mal. Ça va être compliqué demain, ce sera une grosse étape où il risque de se passer des choses. En tout cas on a repris confiance en la voiture, on a fait une spéciale propre. »
Ils ont dit :
Nasser Al-Attiyah : « Nous avons rattrapé quelques voitures devant nous en début de journée. Ensuite, nous avons décidé de garder un bon rythme et de minimiser tout risque. Mathieu (Baumel) a fait un excellent travail de navigation.
Kuba Przygonski : « Nous avons eu beaucoup de types de terrain différents. Des routes rapides, des routes caillouteuses, des dunes, un peu de tout. Nous avons apporté quelques améliorations à la voiture hier soir et maintenant nous sommes plus rapides.
Seth Quintero : « Nous sommes partis devant aujourd’hui et avons couru à notre rythme. Nous avons eu un petit problème avec la navigation, mais ce n’était pas fou.
Matthias Walkner : « La navigation d’aujourd’hui a été délicate avec de nombreux changements de direction. C’était une étape rapide et c’était long, mais j’ai beaucoup apprécié.
Danilo Petrucci : « C’était une étape très longue, donc je suis tellement content d’avoir pu éviter de grosses erreurs. C’était dur jusqu’à la fin. »
Daniel Sanders : « Le plan n’a pas trop mal fonctionné. J’ai rattrapé les gars devant tôt. C’était une navigation délicate et après le ravitaillement j’ouvrais la route. saut de dune. Après cela, j’ai pris un moment po
Kevin Benavides : « Aujourd’hui a été une journée très difficile. Au début, il faisait très froid, mes mains étaient gelées pendant les 100 premiers kilomètres. Après cela, j’ai commencé à me sentir mieux et j’ai pu pousser. »
Toby Price : « Nous avons perdu un peu de temps dans l’étape 4 et c’était à prévoir. Il y a eu quelques petites erreurs mais, dans l’ensemble, nous l’avons surmonté avec un bon rythme et un bon rythme. »
Communiqué – Dakar
Crédits photos : Dakar – Red Bull